Le 12 septembre prochain, la présidente de l’U E Ursula von der Leyen recevra les patrons du secteur automobile pour évoquer les difficultés du marché, notamment la montée en puissance des constructeurs chinois, les tensions commerciales avec les États-Unis et les coûts de production en Europe. D’ici là, l’Association des constructeurs automobiles européens (ACEA) vient de lui envoyer une lettre ouverte. Sa demande? En finir avec l’échéance 2035 qui doit voir la vente de véhicules thermiques interdites, et alléger le calendrier. Explications.
Les arguments de l’ACEA?
Dans leur courrier, les constructeurs se disent «les mains liées» face à une réglementation trop rigide. Et pointent quatre freins majeurs. D’abord, une dépendance quasi totale vis-à-vis de l’Asie pour la chaîne de valeur des batteries. Des infrastructures de recharge insuffisantes et inégalement réparties sur le continent européens. Des coûts de fabrication plus élevés (notamment liés au prix de l’électricité en Europe). Des barrières commerciales pénalisantes, à commencer par les droits de douane américains de 15% qui freinent l’export. Et, enfin, une demande qui serait aujourd’hui trop faible pour soutenir l’offre. Aussi appellent-ils Bruxelles à davantage d’incitations financières pour les consommateurs, une énergie moins chère, et une trajectoire réglementaire moins rigide. «Atteindre les objectifs de CO₂ fixés pour 2030 et 2035 n’est plus réalisable dans le monde actuel.», disent-ils.
ONG et associations s’indignent
Evidemment, la réaction des ONG ne s’est pas fait attendre. Transport & Environment (T&E) a aussitôt dénoncé «une tentative de ralentir, encore une fois, la transition vers les véhicules électriques». A toutes fins utiles, sa directrice Diane Strauss a rappelé que «depuis le début de l’année 2025, les ventes de voitures électriques en Europe ont augmenté de 40%». Et de poursuivre: «Cette lettre traduit un opportunisme politique flagrant qui met les profits à court terme avant les perspectives à long terme.» Pour T&E, il ne s’agit non pas de baisser les ambitions mais de redoubler d’efforts pour rendre l’électrique plus attractif et plus accessible.
Des constructeurs divisés
De fait, nombre de constructeurs se posent sur la même ligne que T&E, et la prise de position de l’ACEA est loin de faire consensus. D’ailleurs, au sein même de l’ACEA, certains acteurs affirment leur différence. Comme Kia Europe dont le patron Marc Hedrich a réaffirmé lors du lancement de la production de l’EV4 en Slovaquie: «Nous préparons une avalanche de modèles électriques. Si nous devions cesser ces lancements, cela nous coûterait une fortune. Nous restons alignés sur une conformité à 100% d’ici 2035.» Une position diamétralement opposée à celle d’Ola Källenius, patron de Mercedes-Benz et président de l’ACEA, qui prône une révision des objectifs, quand bien même il n’y a pas si longtemps la firme allemande visait le 100% électrique d’ici 2030.
Une échéance 2035 marquante et même structurante
Quoiqu’il en soit, derrière ces débats, une évidence s’impose: les investissements massifs dans les batteries, l’essor des gigafactories européennes, la multiplication des modèles plus accessibles et la pression croissante des normes environnementales convergent vers le même horizon. Un horizon forcément électrique. Et 2035 restera forcément un marqueur central dans les prochaines années tant elle a marqué les esprits et structuré l’industrie automobile.